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30 jours pour écrire
Réunion des textes présentés pour le challenge 30 jours pour écrire, organisé par une très jolie Clara.
Un thème, 25 voix qui racontent toutes quelque chose de différent;
c'est beau, la poésie multiple.(j'ai choisi de continuer le challenge, je voudrais prendre 60 jours pour écrire, 60 jours, c'est si court, qui sait ce qui va en sortir ?)
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Par Flippye le 7 Août 2020 à 19:25
ce jour-là je suis partie sans un bruit
sans une excuse, sans adieux, sans prévenir
avec pour tout bagage une larme et un sourire
et pour toujours gravée : la consistance de la lumière qui tombait par la fenêtre
j’espérais que tu allais comprendre mes silences
- aujourd’hui je sais que j’y étais sourde moi aussi -
à force de me taire j’ai cru que tu me donnerais la parole
tu as préféré prêter tes discours à mon mutisme
tous deux complices dans notre décadence
- toi et tes mots, moi sans les miens -
indifférents, imperméables à notre valse amorale
nous avons dérivé absurdément loin
aujourd’hui tu m’appelles l’étoile qui s’éloigne
mais quid de la tristesse, de la colère et des remords de l’astre ?
je ne suis pas qu’une étoile qui s’écarte, je suis d’abord une étoile qui s’est tue -
qui a laissé, sans un bruit, tomber son corps sur le bord d’une route
je suis une étoile qui depuis s’éviscère
avec pour toujours gravée : la consistance de la lumière qui tombait par la fenêtre
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Par Flippye le 6 Août 2020 à 15:51
cinq fois
c’est le nombre de jours où je vais devoir m’harnacher de courage,
empoigner mon vélo et courir sur les toits de lausanne,
rouler de la montagne à l’eau, d’une traite ;
cinq fois
c’est le nombre de fois où je vais franchir la grande porte rouge,
sauter à travers les cerceaux enflammés des biologistes aphones,
jongler avec leurs réponses qui n’ont plus de sens ;
cinq fois, et puis ce sera fini –
enfin je vais pouvoir clôturer les cinq dernières années
emballer ce temps précieux, ce temps passé,
et le laisser, archivé, dans un coin de mon crâne
de mes cinq années de non-ingénieure
je retire un amour immense pour les mathématiques, la logique, tout ce qui s’embrique et se dérive selon des règles fixes
je repars avec cinq amis : le doux-ami, violette mon moineau, le garçon myosotis, l’ami bleu-gyrophare et le chimiste fou, bicéphale
je m’échappe avec une maturité folle ; et, glissée dans la même certitude, ce savoir que je suis capable d’apprendre bien plus encore
de mes cinq années de non-ingénieure
je rentre avec du cambouis plein les mains, et le son des clés qui tintent contre l’alu
(la poésie de la peau froide qui se déchire sur le métal – mes amours de bicyclettes)
je m’éclipse avec la gratitude d’avoir trouvé où aller, avec l’euphorie de me savoir partir
je m’éloigne le dos cousu de cicatrices, le corps racommodé, des sparadraps plein les cheveux, les yeux à demi-clos ;
de mes cinq années de non-ingénieure
je m’évapore sans un au revoir
simplement, je vous quitte
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Par Flippye le 5 Août 2020 à 15:50
souvent j’écris : je grandis. rarement pourtant j’ose prononcer ces mots à voix haute. rendre tangible cette réalité que pourtant j’expérimente souvent au travers de mes textes : je grandis.
de ma croissance résolument non-linéaire je retiens : grandir me demande du temps, énormément de temps, un temps infini. je réfléchis lentement, doucement ; j’ai besoin de solitude pour m’adonner à l’honnêté nécessaire à fixer sur une page mes sentiments du moment. vient ensuite le temps du mûrissement, des chamboulements, il faut que mes mots prennent de l’âge avant d’oser la relecture. puis, plus tard, il faudra revenir, recommencer tout le processus et se rendre compte de la distance parcourue entre le mot a et le mot b. grandir me demande du temps, du temps que je lui donne.
cette dernière année aura eu l’air d’être douce, sans virages en épingle, sans traumatismes ni tsunamis. et pourtant quand je regarde derrière moi je ne retrouve plus ma vie : j’ai trop grandi. sans en avoir l’air. les mots auxquels étaient tressés des torrents de larmes ne me font plus pleurer quand je les prononce : j’ai accepté de partir.
le non que je n’ai jamais réussi à murmurer, je le digère.
il m’aura fallu deux ans pour jouer enfin dans ma propre équipe. deux ans pour accepter que mon corps ne sera peut-être plus jamais mon corps, mais que je peux me prendre dans les bras quand même.
qu’il en faut de la force pour vivre – qu’il en faut pour grandir. c’est une histoire de déchirement et de soulagement, d’écorchures et de cicatrices, constamment il faut se débarasser des idées mortes puis retourner au cadavre reprendre ce qui se garde ; il faut bouturer les idées anciennes, clôturer les idées vieilles, laisser la place aux nouveaux bourgeons ; constamment il faut tutorer, surveiller, questionner, toujours, questionner encore.
de ma croissance résolument non-linéaire je retiens : une colère. celle de la pleureuse qui n’en peut plus qu’on la traite de faible. vous n’imaginez pas la force que cela demande de toujours se laisser emporter par les émotions brutes. vous ne savez pas la solidité nécessaire pour sortir des jours sans fond.
je suis forte, les joues creusées de larmes. je suis forte, la parole évanouie, encombrée de sel. je suis forte, quand bien même je réfléchis lentement, quand bien même il me faut pleurer plus que vous pour arriver au même point. je suis forte et en colère contre tous ceux qui me croient moins solide parce que je pleure, moins tenace parce qu’il me faut passer par le chagrin pour grandir, moins résiliente parce que je traverse des tristesses immenses.
je ne me suis jamais sentie plus inébranlable, plus vaillante et sincère, que lorsque j’ai enfin accepté que je ressens tout trop fort, et que c’est cela, ma force.
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Par Flippye le 2 Août 2020 à 15:59
c’est le son d’une ambulance
qui ne hurle que sous mes cils
souvent je me demande pourquoi tu ne l’entends pas ?
ce sont les cloches du temple
– qui ne peuvent sonner de là où je suis
le temple est à plusieurs centaines de kilomètres
leur tintement pourtant bruisse à l’orée de mes oreilles
c’est le parquet qui craque sous tes pas
- je reconnaîtrais ta démarche entre toutes, toujours -
les jours où ton absence te remplace
tu n’es pas là, et les planches ne craquent pas
ce n’est que moi – que moi
c’est la petite flamme qui miaule devant la porte
je lui ouvre pour l’accueillir
pourtant le perron est vide
et ma tête résonne des miaulements de mon fantôme
tous ces bruits inofficiels
la bande-son de mes ombres
mes petits invisibles à moi
mes chimères inaudibles – ou presque
des heures à me demander
vis-tu à l’intérieur
ou à l’extérieur de mon crâne ?
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