• oublie

    le son des pas doux comme du lierre

    le bruit des pieds silencieux comme des pierres qui rouleraient dans un escalier de murmures

    oublie

    le toucher soyeux du lit vide

    les jacinthes qui piquent du nez dans leur pot trop petit pour leurs bulbes de rêves

    l'odeur imperceptible

    cette envie toujours d'ouvrir la fenêtre en GRAND

    en grand comme pour y jeter sous la gouttière la voix grave des contradictions

    ce lent soupir qui grise les demi-jours

    qui brise nos demi-vies

     

    oublie

    (la décolleuse à mensonges)

    et laisse les basses assassines venir perforer nos tympans

    dans la musique noyer les réflexions stériles

    et laisser danser l'épaule

    droite et puis peut-

    être la gauche aussi, délimiter du bout du corps les

    limites de la danse qui soudain-

    -ement s'invente une possible existence

     

    oublie

    la vase dans le crâne qui obstrue jusqu'aux larmes

    et jette ton corps mordu dans les décibels désinfectants des jours de grand vent

    face à la bouche pleurer ses petites morts

    face à la bise saluer les bateaux perdus

    et à la première bourrasque

    aller poser les doigts sur le grand ventre du ciel

     

    pour y griffer immensément nos amertumes dans la grande décousure des jours fissurés

    qui subitement ne s'empilent plus tout à fait aussi bien qu'avant

    ~

    Jay Fleck 


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  • (it's one of those days)

    où les coeurs tombent des fenêtres

     

    assise sur ma poitrine l'idée diffuse

    de planter sous le gazon des bleus secrets

    qui fleuriront peut-être au visage prochain

     

    roulée dedans mes côtes la sensation floue

    d'un demi-tour au silence coupant comme des ronces

     

    des petits bouts de rien qui ne s'épellent pas

    ne rentrent pas dans les lignes

    ne veulent rien dire

    sinon

     

    vois, je suis là, je respire et je regarde

    la vie qui coule, lisse et rugueuse à la fois,

    autour de mes épaules qui tanguent ses bras chauds et amers

     

    vois, je suis là et je respire, je regarde

    ces émotions abandonnées aux noms perdus

    superflus

    ces émotions en demi-teintes qui m'absorbent

    et me font

    mot après mot

    réinventer mes palettes


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  •  

    j'écris des lettres indiennes - avec mes salutations distinguées, avec des chers Messieurs à droite et des chères Mesdames à gauche - j'écris des lettres indiennes pour oublier que je ne veux plus écrire pour moi - parce qu'à quoi bon, à quoi bon au fond - pour le rythme oui mais la relecture est amère (souvent) et grinçante (toujours) et douloureuse (parfois)

    j'écris des lettres à la plume parce qu'en soufflant dessus elles s'envolent - elles n'ont pas la lourdeur de l'encre ces lettres-là, la paresse de se couler dans le papier; plutôt elles s'étirent et se tirent sans destinataire - je ne veux même plus m'écrire, fantôme illucide
    - parce que quoi me dire, quoi me dire au fond - je n'aime ni me relire ni me souvenir

    et dans l'air je trace les grandes courbatures, l'immense calligraphie du creux que j'aperçois parfois dans tes yeux

    mes lettres sont sans sens, girouettes égoïstes, elles se décalent parfois d'une ligne à l'autre et j'ai tout perdu, la bonté la beauté le sourire en flacon pour les grandes occasions la logique grammaticale la concordance des temps
    - mais à quoi bon au fond, à quoi bon -

    mes lettres n'ont qu'un sens finalement, elles se déguisent gustatives, se laissent savourer dans l'espace vide que tu oses,
    et doucement elles prennent le goût de l'amertume, l'amer tune, sur les papilles en creux, une bitterness à l'odeur de bitume qui s'accentue les jours de brume, quand je m'étouffe avec mes lettres à moitié gercées qui me percent les poumons juste au fond

    ~

     

    Victoria Siemer


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  • je joue à l'obstruction nasale impromptue

    à faire comme si de rien alors que tout

    l'air s'en va, l'air de rien

    et je me retrouve avec du vent dans les mains sans n'en savoir que faire

    le respirer ?

    avec mes poumons perforés jusqu'aux bronchioles ?

    mes cuisses font des bulles bleues qui écorchent jusqu'à ma salive

    jusqu'à mes envies d'ailleurs puisque qu'ailleurs d'ailleurs je ne suis plus

    lausanne, j'ai retrouvé lausanne qui n'avait jamais bougé

    mais respirer, respirer j'ai oublié comment commencer

    dans le vide je creuse des trous pour y fourrer ton absence

    mais trop de rien donne un peu de tout

    et c'est des paillettes et du plastique plein la gorge que je m'étouffe

    je joue à l'obstruction nasale impromptue

    j'écris des poèmes sans sens puisqu'il me manque certains des miens

    Iceberg Brioche


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