je ne suis qu'un nuage déguisé en épithélium

à trop pousser de travers je n'ai plus de colonne

juste un lacet rouge qui me serpente entre les côtes

je parle toujours trop de mes côtes

mais c'est parce que toute la peau qui les recouvre m'épuise

toute cette peau à la fois pour de vrai et un peu pour de faux

je ne suis qu'un brouillard fragmenté d'un concept d'homme

je ne suis même pas un homme

même pas une brume

(tu n'as pas dit la recette des bugnes qui traîne dans mon livre, c'est ton papier ton écriture c'est toi
dans ce papier il y a toi c'est toi ce bout de papier c'est toi
tu n'as pas dit le diamètre de la gorge quand mes yeux volent ton écriture
la gorge serrée comme par un colson rien plus rien ne l'ouvre quand 
je me rappelle que tu es morte et moi plus tout à fait vivante)

tu dis voyage

je dis j'ai peur de vivre

j'ai mal de vivre

j'ai beau de vivre

je ne sais pas vivre

pas encore

j'apprends à vivre

et c'est douloureux

j'ai le coeur distendu

et la colonne déplacée

j'ai des mensonges plein les cheveux

et de la maturité en maturation entre les côtes

j'ai les doigts noués à vos doigts

les yeux cousus de larmes et de beauté

j'apprends à vivre

et ça m'arrache les tripes

puisqu'il faut tout vomir pour exister

puisqu'il faut tout donner pour vivre

parce que respirer n'est plus automatique

j'apprends à vivre

te raconter les paillettes sur les joues de l'enfant brun

dans la mousse douce de barbe-fleur

dans les yeux du naufragé amoureux

sur la peau constellée de kilomètres du pirate en caravelle

te raconter les paillettes versées sur nos amitiés éternelles

les jours lointains déteignent tellement vite

ils ont le parfum de l'eau vive

et le goût de tous les possibles