• AIF ~ Le pathétique du monde

    "Je pense souvent à cette expression "prendre l'air".
    Cela veut dire que l'on va ailleurs, pour le trouver.

    Cela veut dire littéralement : où je suis, je m'asphyxie."

    David Foenkinos, Nos Séparations

    ~

    AIF ~ Le pathétique du monde

    ~

    Je fais semblant

    semblant pour tout semblant de rien

    je fais semblant tu sais

    mais mais mais mais mais mais mais

    dans les rues du matin où on se perd

    le corps, les coeurs se fendent au détour

    d'un détour, et subitement les

    larmes débordent, COMME TOUJOURS !

    Comme tous les jours.

     

    Dans la rue qui s'embrume sous les larmes

    chaudes de colère et d'angoisse,

    on voudrait s'accroupir près du plot et

    de l'arbre en fleur et pleurer le monde

    et la souffrance qu'il engendre;

    on voudrait marcher pour ne plus

    ressentir, se perdre pour se perdre,

    abandonner ses clés sur le bitume amer

    pour ne plus jamais rentrer

    abandonner son corps pour ne plus penser

    - voudrait devenir folle pour que tout

    ça s'arrête, ça, le monde à fleur

    de peau qui n'entend pas le fracas

    du silence, ça, les mauvais poèmes

    des filles pathétiques, ça, l'humanité

    qui crève les yeux, la décadence

    programmée, nos chairs qui pourrissent,

    ces murs contre lesquels on se fracasse

    sans relâche, ça, notre humanité pitoyable,

    nos existences déjà périmées, ça,

    l'empoisonnement du monde

    et la conscience simultanée de l'inutilité de vivre,

    du pathétique risible de l'existence

    qui nous perfore les poumons

     

    - on voudrait descendre pleurer au bord

    du lac, fumer beaucoup pour apprendre

    et pour se souvenir, chercher un recoin

    dans la ville pour y cacher la souffrance,

    la violence, les cris et crises de larmes

    - mais il y a des gens partout et leurs

    regards agressent mon corps de pluie

    qui apprend douloureusement la transparence

     

    On voudrait se fuir pour quitter le vide

    qui niche dans ma poitrine

    pour vomir le béton qui tapisse mes poumons

    abandonner mes bronchioles en verre pilé

    qui me font mal dès que je respire

    on voudrait l'invisibilité pour pouvoir pleurer mille ans

    pleurer mille vies

    pleurer mille mondes

     

    (alors on remet les masques en place,

    on va nager pour pleurer sous l'eau,

    espérant la noyade, l'oubli, l'absence

    de poinçon au coeur, la fin de

    l'empoisonnement par le monde)

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