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Par Flippye le 11 Août 2016 à 22:27
"Le texte du jour doit comprendre la phrase : « Vers quel ciel, auquel il ne croit pas ? »"
Il erre, le nuage en voyage, il flâne, il lorgne sur la Laponie lointaine, sur la Russie qui s'approche, il arpente les côtes de Norvège (puisque ses doigts ont délaissé les miennes), il s'absente, il s'invente ailleurs, il s'accroche à la peau des bouts de pays qui ne lui appartiennent pas, il les glisse dans sa poche, le nuage, il vole des frontières aux cartographies meurtrières.
Parti, il est parti le nuage, parti en voyage, en oubli, en pèlerinage, et tandis que sa présence se délite il se conjugue en duo avec un autre que moi (pourquoi je ne prends pas toute la place dans ta vie dis ?), il dort avec cet autre, mange avec cet autre, vit avec cet autre en entier complètement, et moi je suis assise là, devant la lune qui ne ressemble pas plus au soleil que toi, et je me questionne, me poinçonne le coeur d'insondables doutes (ça me ronge et ça me cogne, j'ai des bleus jusqu'à l'âme)
il est parti le nuage, en voyage (en oubli en pèlerinage), mais reviendra-t-il, rentrera-t-il vraiment, le toucherai-je, sa peau aura-t-elle changé, de goût de texture d'odeur, ses yeux me verront-ils pareil, va-t-il m'oublier, le nuage en cavale après des mirages, est-ce que je lui manque, pense-t-il à moi, le nuage aux bras froids, où est-il, où est-il, il est parti le nuage mais pourquoi ce départ, pourquoi cette frontière extérieure portée comme une armure de coeur, où va-t-il, le nuage, où court-il, vers quelles mers, (vers quelles mères), vers quels ciels, auxquels il ne croit pas ?
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Par Flippye le 10 Août 2016 à 23:33
oh, j'ai tout effacé le texte de ce soir, tout effacé, un clic un vide, tu sais pourquoi ?
le feu est venu dans le jardin ce soir et il a tout mangé, tout, les voisins les poubelles la cabane, les arbres le vieux pin le bois pour l'hiver, la palissade les fourrés les buis, et le feu est venu dans le jardin et soudain mon père hurlait à la lune d'appeler les pompiers, et les voilà ma mère mon père au maigre sabre de gouttelettes d'eau, il faut sauver la cabane, et les voisins et le vieil arbre et les poubelles qui fondent sous la chaleur, et le feu est venu dans le jardin, et d'un coup l'angoisse et l'adrénaline et la sensation affreuse des secondes qui s'écoulent chacune comme des brûlures sur la peau, est-ce que tout va s'enflammer tu crois ?
et le feu est venu dans le jardin, les feuilles ont viré au rouge rouge et les braises volaient dans la nuit tandis que la sève du vieux pin servait de fuel aux dents acérées du feu qui pourchassait la maison; et tout s'est fondu en un capharnaüm gigantesque, la chaleur sur ma peau comme autant d'aiguilles, et la neige en pleine nuit d'été, les serpents qui se gonflent d'un coup sec pour se gorger d'eau, et l'amiante emballée posée juste à côté de la cabane, il faut bouger les voitures, mettre les bidons d'essence du cabanon en sûreté, chercher le chat, le chat, les clés, la porte de secours mais soudain le jardin semble sans fin
mais ce feu dans le jardin, les gyrophares qui clignotent bleu bleu bleu, les voisins qui s'agglutinent et les poubelles qui se marrent, allongées lassées coulées sur le goudron, le chien, le policier, la policière, le pyromane, la fumée qui étouffe et les confettis dans le ciel, la nuit qui coule sur nos mains, l'échelle, la cendre partout, la braise qu'on piétine, l'homme à la langue mélangée, les photos pour l'assurance
et le feu
le feu dans le jardin
et puis le vieil arbre comme un dernier symbole, affreux, efflanqué, cime découpée par les jets des sauveteurs, scruté par mille yeux curieux-voleurs, le vieil arbre si sec qu'il jouait à la torche volante, trône, il trône, brûlé vif il siège sur le jardin recouvert de neige au carbone atone, il trône, totem nocturne à l'écorce raclée par les ongles des flammes, et dans le ciel à travers la fumée, les étoiles semblent rire
semblent rire de nous voir courir après des fantômes de feu, après des feux-folles-eh qui auraient un peu trop tiré sur les allumettes
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Par Flippye le 9 Août 2016 à 23:08
Belle à en pleurer, à en croquer mes lèvres comme des livres trop mûrs, aux pages pourries par l'été meurtrier;
belle à en pourrir, à en fumer de l'intérieur des refus macérés à l'extrême, des négatifs oblitérés par l'oubli d'aimer;
belle à en sourire, sur les pavés noirs qui se tordent sous les pas perdus des leucémies âmées-cachées;
(et tu fais le tour de ta chambre, et tu sens ton coeur qui se cambre)
belle à en rire, à en éclater en grelots qui cliquèteront sur l'immense perron du temps, clochettes feuilletées par le vent mordant comme l'annuaire des vieux beaux jours, des vieux beaux amours;
belle à en partir, à en fuir la ville aux fossettes de lierre et aux jeunes filles en fleurs, les nuages se promènent en Laponie et me promettent de revenir - mais la Russie d'abord, la Pologne avant, l'Oubli en premier, tant de pays ils sont là ils sont si près tu sais il faut y aller
belle à n'en rien savoir, on se laisse guider par les pulsations asymétriques, boum boum ton corps sur le mien boum, boum boum le noir qui se détériore, le sang qui fait des boum-bulles, les semelles qui claquent le sol (boum) en y laissant de grosses traînées d'alcool et de secrets éventrés
belle à en crier, à s'en arrêter net pour esquisser encore une fois des prunelles ces lèvres juteuses qui semblent tant promettre
belle à croquer, comme on mordrait à pleine dent dans la trame des jolies musiques, celles qui parsèment nos existences malheureuses d'âmes en peine, celles qui se traînent et cadenassent leur corps le long des autoroutes émotives cloisonnant nos coeurs
belle à en souffler, à en exsuder des myosotis par tous les pores
belle à en rêver, la nuit, le jour, d'avirons qui nous emmèneront (ailleurs), à en croire les diseuses de bonne aventure qui nous emballent nos possibles dans papier glace et du sucre en poudre
belle à jeter, comme la boule de cristal fissurée de l'autre fée-fêlée, illusion de consultation erronée, aux chiffres biaisés chantant le long de nos mains des futurs discordants, écorchant les coins du coeur
alors qu'elles ont dit non, les cartes, elles ont crié non, hurlé non, tatoué dans chaque cellule une négation qui
depuis, tu n'écris plus ;
moi j'écris trop
mais nos mots
(comme nos mains)
(comme nos corps)
ne se croisent plus
ne se lisent plus
ne se
touchent plus
hurlé non, elles ont chanté non les cartes, chuchoté non, surjoué le non
et depuis le trèfle me pique lorsque je le porte près du coeur, et ton corps est aux abonnés absents (boum) tandis que je
joue aux corbeaux aux bateaux qui fument je joue à qui sera
la plus belle je prends des pilules pour dormir mes lèvres gonflent et je ne sais
à qui les offrir je ne sais
plus à qui dire
aux cartes non
je ne dirais pas aux cartes non;
depuis les cartes bafouées
j'ai du vendre ton prénom.
Depuis les cartes,
tu m'as effacée.
Depuis
(les cartes)
je surjoue la belle à en crever
aux lèvres pleines
(au coeur en petits morceaux
de sucre glacé, dont on fait des poèmes morcelés)
~
(en italique, une citation de Francis Lalane, Que la vie est triste, une petite merveille)
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Par Flippye le 8 Août 2016 à 23:45
l'autre c'est
une âme à frotter contre la mienne
une peau nouvelle sur laquelle irriter mes mains
c'est une autre histoire
d'autres secrets, une autre famille, d'autres voyages intérieurs,
l'autre c'est une façon de grandir
en écorchant l'une contre l'autre nos âmes à nu
et puis il y a cet autre
(mon autre)
mon antre;
et puis il y a son écriture
ses n si tordus qu'ils boitent sur les lignes qui vacillent
et puis son dos
son odeur
(ma douceur)
son visage qui gobe le soleil
ses mains qui savent englober mon corps
il y a cet autre
savoir qu'il existe me rend joyeuse
quand bien même
nos vies ne se mélangeraient pas
il y a cet autre
et nos différences
me frappent chaque jour et
m'aident à grandir
(doucement)
(ma douceur)
il y a cet autre
au parfum d'opium qui me hante
à la voix douce quand c'est aux arbres qu'il s'adresse
l'autre au rire qui éclabousse
au sourire qui me démange même l'intérieur des poumons
il y a cet autre
aux yeux qui explosent
aux doigts qui explorent
chef du péage de mon coeur
douanier de mon corps
il y a cet autre
au relent de soleil
au goût de nuage
sensation tendresse piquante
piquetée d'étoiles pelées
épluchées
débraillées
et dans mon regard
comme l'envie d'aimer
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