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    Viens, on va aller un peu cracher sur la nuit du monde, sur ceux qui se pressent leurs paupières jusqu'à en extraire les dernières gouttes, mais qui ne dorment pas, ne pleurent pas, viens, on va aller cracher sur la nuit du monde et sur ceux qui jouent à l'absolescence, à la disparition déprogrammée jusqu'à l'étiolement inévitable des souvenirs périmés.

    (viens, on va cracher sur la nuit, la nuit et ses relents de cauchemars, sur son odeur âcre de peur, dans son parfum de petites boîtes en bois rouge qui se balancent au-dessus des draps, sensation moquette tachée, couleur famille en pleurs, les enfants au zoo, Clara à la cave, et ce refus ignoble d'être désignée coupable - je n'ai rien fait si ce n'est errer dans son absence volontaire !)

    Viens, on va aller cracher sur la nuit et sur sa javel qui n'efface pas les empreintes, sur les chauves qui ne geignent plus une fois la main posée sur leur ventre, cracher dans leurs cafés, dans leur sommeil, viens, on va leur faire boire une mauvaise nuit, leur préparer un mauvais réveil.

     

    Quatre pensées pour me hanter jusqu'au lever du jour (ah elle est belle la vie, ah qu'il est loin l'amour), j'erre dans mon lit où j'apprends à danser sans dormir, car Morphée, amante insatiable, se contorsionne dans d'autres draps (tandis que je rêve de mâchoires, alors je rêve de mâchoires), quatre pensées pour me bercer trop près des murs, sur lesquels j'éclabousse de toute ma vie

    (et les cailloux en forme de coeur et les trous en forme de toi à l'intérieur)

    soudain un peu d'atmosphère

    quelques atomes pour détendre l'air

    mine de rien

     

    et le jour se lève

    déjà 

    le matin

     

    humeur sombre comme le café

    (dans sa robe rose de tulipes fanées)

    humeur sombre pour la journée-comme-café-au-lait-renversé

     

    et si je le peins sur mes lèvres

    peut-être viendra-t-il les

     

    embrasser

     

    (?)


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